Une bouffée d’oxygène sur le Lac Titicaca

Il est 16h et nous venons d’arriver à Copacabana… en Bolivie.

Malheureusement, comme dans la vraie vie, il ne suffit pas d’adopter un nom ou titre pour devenir grand et Copacabana en Bolivie n’échappe pas à la règle. C’est un petit village sans charme au bord du Lac Titicaca qui n’est rien d’autre qu’une étape pour les touristes qui souhaitent se rendre sur la belle île du Soleil, (l’Isla del Sol).

C’est avec hâte que nous nous sommes échappés le lendemain matin de notre chambre d’hôtel sordide et glacée – comme la maison de Christophe et Virginie nous manque ! 😉 –

Il est 8h30 lorsque nous arrivons sur l’embarcadère, enfin disons plutôt le terrain vague sur lequel se trouve un ponton de fortune. Le ciel est gris et il y a de nombreux voyageurs dispersés autour de nous sur la terre boueuse, leur sac à dos sur le dos. Tout le monde a hâte d’embarquer, il fait froid et l’humidité continue de nous pénétrer malgré les 4 couches que nous avons sur le dos.

Quelques minutes plus tard, un rafiot se présente à nous dans la brume du lac Titicaca, il est long, étroit et n’a pas l’air d’être un vaillant vaisseau. Pour tout dire, il me rappelle un peu la barcasse de fortune que nous avions prise au Cambodge sur le Mékong. Il faut se rendre à l’évidence, le trajet va être long…

Nous sommes environ 50 là-dedans, serrés comme des sardines avec nos sac à dos sur les jambes. Certaines personnes sont même sur le toit, chaque recoin est utilisé et optimisé, ça fait un peu peur à voir, mais nous n’avons pas le choix, c’est ça où la nage.

Les moteurs démarrent, heu non pardon, LE moteur démarre … A ¨vue d’oreille¨, il fait environ 70 cv max. Au bout de 5 minutes nous nous retrouvons enfumés comme des taupes par les gaz d’échappement qui se répandent d’un seul coup dans l’habitacle. Nous resterons là, sans que le bateau avance, enfumés pendant 5 bonnes minutes en attendant que Monsieur le capitaine fasse chauffer son moteur ! C’est à peine croyable, le gars préfère enfumer les gens pour chauffer son moteur plutôt que démarrer tout de suite, Je l’aurais bien jeté à la mer celui-là, enfin… dans le lac.

Les gens autour de nous commencent à tousser, je prends un masque (que j’ai toujours avec moi) que je donne à Jade, Jules porte son cache-nez et Aurélie et moi essayons de nous protéger avec notre veste comme nous pouvons. Les yeux nous piquent et deux personnes ouvrent les deux minuscules et uniques fenêtres devant nous, histoire de nous donner un peu de souffle. C’est alors que l’embarcation émet un soubresaut et amorce enfin un mouvement vers le large, évitant de près le pugilat. Les fumées se dissipent peu à peu et notre embarcation atteint rapidement sa vitesse de croisière, si l’on peut dire. Décidément la Bolivie c’est pas facile…

Une vitesse de croisière fulgurante, j’ai cru voir un instant une truite nous doubler je pense. Tellement impressionnante, que je me demande si on n’aurait pas plus vite fait à la nage ! Une heure trente et 15 kilomètres après… Non, non je n’exagère pas, on a vérifié les distances dans ¨maps.me¨, les rivages de l’île commencent à se dessiner devant nous. Les terres sont arides et présentent un relief très raide, je sens qu’on va s’amuser pour grimper là-haut… Le lac Titicaca étant déjà à 3 852m exactement (Lac navigable le plus haut du monde) il va falloir grimper au moins jusqu’à 4 000 mètres pour nous rendre en haut, où se trouve le village.

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Heureusement, les ¨burros¨ sont là pour soulager notre peine ! Et c’est sans hésitation que nous acceptons l’offre d’un couple bolivien qui nous propose pour 40 bolivianos, de charger le dos de leur âne avec nos deux gros sac-à-dos.

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Nous voilà partis avec nos 3 petits sacs à dos, prêts à affronter le chemin abrupt devant nous. Au bout de 5 minutes, et à peine 30 marches grimpées, j’ai comme l’impression que mon cœur va exploser ! C’est incroyable, nous devons fournir un effort considérable à chaque marche et faire des pauses tous les 20 mètres pour recouvrer notre souffle. Je pense alors aux alpinistes qui grimpent les hauts sommets du monde, je ne m’étais jamais aperçu à quel point c’était une performance hors pair.

Arrivés là-haut, nous jetons nos sacs, épuisés que nous sommes et prenons nos marques dans une chambre sur une terrasse avec une vue imprenable sur le Lac Titicaca. ¨Nous sommes sur le lac Titicaca !¨ Dis-je, émerveillé. C’est génial, nous savourons l’instant et encore une fois nous sentons privilégiés d’être dans un lieu aussi mythique.

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Le soleil est au rendez-vous, nous sommes chanceux car il pleut souvent à cette période et nous ne tarderons pas longtemps pour trouver un restaurant sur les hauteurs de l’île avec une vue incroyable.

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Notre soupe de quinoa avalée et notre corps réchauffé par la même occasion, nous voilà partis en chemin vers le point culminant, le mirador.

Nous croisons beaucoup d’ânes (dont des ânes de Provence bizarrement, avec la croix sur le dos) dans un paysage et une lumière magnifique. Sur les abords de nos chemins, des boliviens, la silhouette voutée, s’acharnent avec vigueur à retourner la terre. Ils sont là en famille, dans un paysage idyllique, à butiner cette terre aride sur le sommet de l’île du soleil. Le tableau est splendide, l’air est léger et nous oublions comme par magie la rudesse de ce pays pour laisser notre esprit divaguer vers l’horizon du mystérieux lac Titicaca.

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Les enfants virevoltes sur les chemins caillouteux et vont à la rencontre des ânes qui se laissent caresser le crâne tendrement. Il est environ 15h00 et nous étouffons maintenant avec nos 4 couches sur le dos. C’est vraiment surprenant à quel point les degrés jouent au yoyo ici. Chaque matin, nous sommes transis de froid et nous partons comme pour aller skier et dans l’après-midi, nous nous retrouvons en un rien de temps en tee-shirt sous un soleil brulant. Étonnant.

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Le soir venu, Aurélie, en experte, nous a dégoté un petit restaurant vraiment magique, perché sur le sommet de l’île, dans une forêt d’Eucalyptus.

Nous nous y sommes rendus à la tombée du soleil sur un chemin caillouteux où les silhouettes des arbres et des ânes se détachaient dans le clair-obscur de l’horizon.

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Au loin, nous devinons un panneau sur lequel est inscrit : ¨Vous vous trouvez à 4010 mètres au restaurant Las Velas¨ .

Quelques pas plus loin, nous apercevons de petites fenêtres éclairées par des bougies qui nous invitent à pénétrer dans les lieux. Nous poussons la porte en bois, entrons d’un pas feutré, l’ambiance est cosy, les bougies caressent nos visages et une douce musique brésilienne vient colorer l’atmosphère. Tout est simple, on se sent merveilleusement bien. Nous sommes perdus dans cette cabane sur la crête d’une petite île, qui flotte sur le lac Titicaca.

 

 

14 réflexions sur “Une bouffée d’oxygène sur le Lac Titicaca

  1. Mamy dit :

    Quel poète ce Pierre ! Nous sommes avec vous dans cette magie des éléments. C’est divin ce que tu narres avec délicatesse. La forêt d’eucalyptus, fermons les yeux et nous y sommes. C’est un parfum subtil, un vrai régal. Merci Pierre pour ce récit envoûtant et tous les autres. Bisous à tous les 4.

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  2. Michelle COUAVOUX dit :

    enfin vous revoilà ! j’ai eu le temps d’aller skier et revenir pas de nouvelles !
    heureusement M.C.B. m’a rassurée : vous étiez bien arrivés en Bolivie. Ouf !
    Et là je suis un peu déçue : J’avais en tête un lac Titicaca complètement différent avec des habitants occupés à fabriquer des sortes de barques en jonc . Peu-être les trouverez vous plus loin.
    En tout cas cet endroit n’a pas l’air d’avoir bougé depuis des siècles et ce calme qui nous saute aux yeux est reposant.
    J’ai failli ne pas reconnaître Aurélie dans ses grandes jupes multicolores ! je plaisante…
    Bravo à Pierre pour sa prose toujours très appréciée et gros bisous à tous les quatre. .

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    • promeo4 dit :

      Coucou, et oui ne t’inquiètes pas comme ça! on avait pas trop internet ces derniers jours pour publier.
      Sinon pour le lac Titicaca, il y a bien du côté péruvien à Puno, des iles flottantes (Uros) faites de Totora (genre de roseau) par les habitants. Mais des amis y étant passé il y a quelques jours nous l’ont déconseillés car c’est devenu apparemment un vrai « disneyland » où on t’embarque sur ces bateaux pour aller de point touristique en point touristique afin d’acheter des souvenirs tout le long. Donc nous avons préféré éviter ce coté là du lac.
      Gros bisous ma tatan! Aurélie

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  3. Verrier Romain dit :

    le temps d’une virée à la montagne, une clavicule en moins pour Toto et hop vous êtes sur un des toits du monde ! votre histoire de bateau m’a fait penser à des sorties du même type sur le rafiot de Joseph ! j’ai aussi vu des sardines nous doubler 🙂 !
    J’adore le look de la bolivie cela change des marcelles de Pedro 🙂 !
    La biz

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    • promeo4 dit :

      C’est vrai que tu l’as jamais connu en mer le bateau de Joseph toi… 😉
      T’inquiétes mes marcelles reviendront car a 98% d’humidité je peux te dire que tu les kiff tes marcelles !
      Biz à vous 4 !
      Pierre and co

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  4. Quillet dit :

    C est un bonheur toujours renouvellé que de vous lire ! !! J adore. Pour les ânes, cela me fait furieusement penser à pédro l’âne vert.nous y reviendrons si nécessaire. En tt cas, continuez à profiter et à accumuler ces merveilleux souvenir. La bise

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    • promeo4 dit :

      Pedro l’âne Verde ! ;-)) J’ai jamais réussit à la raconter aussi bien que toi ! Qu’est ce que tu as pu me faire rire avec ça !
      Rien que d’y penser je me marre tout seul…
      Grosses bises !
      Pierre and co

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  5. Jean-Marc MORIN dit :

    L’homme n’est pas fait pour l’altitude et son métabolisme s’y adapte plus ou moins bien, en plus si l’on cherche à vous asphyxier aux vapeurs de moteur à explosion cela fait beaucoup. Heureusement il y a les récompenses de l’effort.

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  6. Jimmy dit :

    Coucou les amis!!!!

    Super tous y est, les couleurs, les sens et même l’odeur presque. Bien que vos photos soit magnifiques, je n’est nul besoin de les regarder durant ma lecture si bien décrite par vos mots. Je dois avoué que je ne suis pas un grand lecteur, mais vos récits me font pensé a la douce narration de Marcel Pagnol…..
    Hâte de vous retrouver et de finir ce livre ensemble…….

    Hasta muy pronto!!!!

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    • promeo4 dit :

      Marcel Pagnol…;-) Ca c’est un compliment ! Mais faut pas exagérer quand même… 😉
      On a hâte de vous retrouver au Mexique, ça va nous faire du bien de voir des potes ! Je commence à me laisser pousser la moustache et toi ? C’est le deal sinon ça marche pas là bas. Moustache obligatoire !
      Biz les cocos
      Pierre

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      • Jimmy dit :

        c’est la réel impression que j’ai eu!! la mode en France est plus sur la barbe façon « halla akbar » et vu l’imberbe que suis c’est pas une moustache de 14 ans qui va me faire passer pour un mexicain!!!

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